Il y a un moment où la haine raciale devient vraiment emmer...

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Pris dans une tempête de neige, Sayanel luttait pour sa survie. Les violentes rafales de vent qui le déstabilisaient en permanence, le froid mordant qui lui engourdissaient tous les membres, et surtout l'intense chute de flocons qui lui obstruait la vue étaient autant de défis qu'il voulait relever. Cette mise à l'épreuve annuelle était, selon-lui, le meilleur moyen de préserver une forme olympique.

En effet, chaque année, il escaladait les Montagnes Ancestrales en plein cycle hivernal, et tentait d’atteindre le refuge de Blanc-Bois, qui se situait à peine cent mètres au dessous du point culminent du plus haut pic asthaëllien, la Dent d'Obsidienne.

L'humain continua donc son ascension, cherchant à travers le voile blanc qui l'entourait des prises dans les passages rocailleux, et essayant de ne pas se faire surprendre par une avalanche ou de tomber dans une crevasse dans les endroits où l'épaisse couche de neige faisait plusieurs mètres de haut.

C'était un défi mortel qu'il tentait de relever, et la moindre erreur pouvait lui être fatale. N'importe qui l'aurait pris pour un fou, mais il adorait ça. Sentir l’adrénaline dans tout son corps, son cœur battre à deux-cents à l'heure, le sang affluer à tout vitesse dans ses veines... Il aimait également se sentir tenailler entre la chaleur brûlante dégagée par ses muscles et le froid persistant qui le cernait de toutes parts.

Enfin, après plusieurs heures d'une lutte acharnée, il arriva dans l'espèce de petite vallée où était établie l'auberge du Blanc-Bois. Ainsi cachée au milieu de ce creux en pleine montagne, la petite bâtisse était protégée du vent, et formait une sorte de havre paisible où la tempête n'avait pas de prise. Un peu comme l’œil dans le cyclone.

Sayanel parvenait à peine à tenir sur ses jambes quand il donna deux rapides coups sur la porte en pin massif du refuge. Il était épuisé. Jamais il n'avait vu une tempête d'une telle violence, même après trois ans de ce stage intensif qu'il s'imposait.

Ce fut une vieille femme d'une soixantaine d'année appelée Elna qui vint lui ouvrir, un torchon passé sur son épaule et une assiette dans la main droite. Quand elle le vit, un large sourire se dessina sur ses lèvres. Ce n'était pas la première fois qu'elle le voyait, et pourtant ses yeux brillaient d'une admiration certaine quand ils croisèrent les siens. Il devait représenter sa seule visite masculine potable de l'année, apparemment.

Elle le guida jusqu'à la salle commune, d'une taille étonnamment grande pour le nombre de visiteurs qui passaient chaque saison, et l'installa près du foyer d'une grosse cheminée en pierre. Elna alla ensuite lui chercher un bol de soupe, afin de mettre fin aux tremblements qui le secouaient depuis que la neige avait passé ses épaisses couches de protection.

Agité de puissantes secousses mais fier vis à vis de lui-même, Sayanel savourait intérieurement sa petite victoire annuelle, songeant tout de même à la centaine de mètres qui le séparait encore du véritable sommet. Car c'était le sommet de la Dent d'Obsidienne qui était le véritable but de cette expédition. Il ne pouvait pas vraiment prétendre avoir fini son entraînement sans d'abord s'y rendre.

Soudain, on toqua à la porte. Sayanel leva un sourcil. Deux visiteurs dans la même journée ? C'était vraiment exceptionnel. Quelques minutes s'écoulèrent, et les coups retentirent à nouveau. Elna n'avait visiblement pas entendu qu'on frappait à la porte. Elle ne vint pas non plus après que les deuxièmes coups furent frappés, et le voleur se leva avec un soupir en réalisant que s'il n'ouvrait pas lui-même, la personne à l’extérieur allait sûrement mourir de froid.

Il tourna donc la poignée en fer rouillé de la porte, et regarda le mystérieux visiteur qui lui faisait face. Ou plutôt la visiteuse. Car c'était une elfe qui se tenait devant lui. Une elfe dont l'expression se transforma peu à peu quand elle le vit. Elle passa d'étonnée à dégoûtée et enfin à furieuse en l'espace de quelques secondes, pour finalement s'arrêter sur “ envie de meurtre ”. Face à toute cette haine gratuite, Sayanel esquissa un pas en arrière. Une ennemie ? Une espionne ? Ou pire... Une ancienne conquête ?

Elvawien avait décidé de partir seule dans les Montagnes Ancestrales. Seule. Elle avait besoin de réfléchir... Et au moins, elle était sûre de ne croiser personne dans ces montagnes. Tant mieux. Même si escalader ces montagnes demandait beaucoup de force physique et de courage, elle s’en savait capable, car auparavant elle les avait gravit avec des anciens amis à elle. Des traîtres. Grâce à cette expérience, Elvawien savait qu’une petite auberge existait en haut des montagnes. L’elfe avait décidé de s’arrêter dans cette auberge, au moins elle serait sûre de ne pas être dérangée, car personne ne montait ces montagnes, sauf les fous. Et elle. Les conditions climatiques étaient horribles. Une tempête de sable faisait rage, mais même si Elvawien, grâce à ses origines elfes, n’avait pas froid, avancer était très difficile. Mais au moins, la difficulté lui permettait d’avoir les idées claires, et de réaliser à quel point il fallait haïr tout être humain. Même elle. Elle se demandait même si elle n’allait pas s’installer définitivement dans ces montagnes. Là, elle était sûre que personne ne la dérangerait ! Etre intense faisait énormément de bien à Elvawien. Elle trouvait ainsi la force de toujours haïr sa race, haïr ses parents, haïr Cette nymphe, bref, haïr tout le monde. L’elfe avait déjà rencontré l’aubergiste, et elle savait que celle-ci ne cherchait pas trop à parler, ni à en savoir trop sur ses clients. Encore une raison de plus pour s’installer dans les montagnes. Et puis, dominer le monde plaisait à Elvawien, et du haut des pics des Montagnes Ancestrales, on ne pensait qu’a ça : dominer le monde. Rien que de se sentir supérieur aux nuages, on se sentait supérieur au ciel, autrement dit aux dieux, s’ils existent. Mais l’elfe ne croit pas aux dieux. S’ils existaient vraiment, elle ne serait pas née, ou alors, elle était venue au monde clandestinement, et ses parents n’avaient pas informé les dieux... Elvawien sourit en entendant cette stupide hypothèse. Elle avait vraiment l’esprit tordu ces derniers temps... L’extérieur la ramena à la réalité, et la tempête de neige sembla doubler de force. L’elfe avait envie de pouvoir s’arrêter, car la tempête commençait sérieusement à la fatiguer... Heureusement, Elvawien était motivée par le fait de trouver un bon lit douillet et sa meilleure amie de solitude. Elle sourit. Et son sourire s’élargit encore plus lorsqu’elle pensa qu’elle venait de sourire plus de fois en quelques minutes qu’elle ne l’avait fait pendant toutes les années précédentes. Cet endroit lui plaisait. Vraiment. Elle sentit l’odeur de la cheminée longtemps avant d’être arrivé à l’auberge. Elvawien pressa le pas, et aperçut l’auberge, au milieu d’une vallée. Arriver devant la bâtisse, l’elfe frappa à la porte, attendant que l’aubergiste vienne lui ouvrir. Elle attendit. Plutôt longtemps pour juste ouvrir une porte. Finalement, ce ne fut pas l’aubergiste, mais un humain qui lui ouvrit. Un humain ! Dans les montagnes ! Elvawien fut très surprise, puis fut dégoutée. C’était ses montagnes, et cet humain n’avait rien à faire là. L’elfe était furieuse. Très furieuse. Elle allait virer ce stupide humain, par tous les moyens possible. Et le premier était le meurtre. L’intéressé sembla comprendre, car il recula d’un pas. Tant mieux. Elvawien s’avança d’un pas. Tant mieux. Elle essayait de lancer des éclairs avec ses yeux, elle voulait faire comprendre à cet humain qu’il n’avait rien à faire ici, et qu’il avait à partir. L’elfe lança, le plus méchamment possible :

- « Je peux savoir ce que vous faites là ? »

Elle n’attendait pas de réponde, elle cherchait juste à ce que l’humain parte. Et en vitesse.

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Sayanel détailla l'elfe. Vêtue d'une simple tenue en fourrure et portant simplement un couteau de pierre brute, elle ne représentait pas vraiment une réelle menace. De ses yeux émeraudes jaillissaient des éclairs, et tout son corps semblait dire « pars ». Elle était d'un gabarit plutôt petit pour ceux de sa race, si bien qu'elle était légèrement plus petite que lui. Il esquissa un sourire. Elle devait être bien audacieuse pour se comporter ainsi, et de surcroît devant lui.

- « Je peux savoir ce que vous faites là ? »

Sa question eut le mérite de surprendre Sayanel. Que pouvait-on faire au beau milieu des Montagnes Ancestrales, dans cette petite auberge, se ce n'était gravir le pic pour en atteindre le sommet ?

Soudainement conscient qu'elle avait fait un pas vers lui, il recula de nouveau, mais sans pour autant garder la même posture. D'abord un peu sur la défensive, il avait très vite compris que la raison de cette haine ne venait sans doute pas d'une affaire sérieuse, comme un assassinat ou autre. Peut-être était-elle tout simplement une ancienne connaissance ?
Sayanel se redressa donc de toute sa taille, creusant l'écart entre elle et lui, et lui faisant bien comprendre qu'il n'avait pas l'intention ni d'engager le combat, ni de repartir la queue entre les jambes. Même fatigué, il conservait une certaine fierté. Et pour le moment, tout ce qui l'intéressait c'était le vieux fauteuil en cuir dans la salle commune.

D'un ton mi-narquois mi-interrogateur, il lui répondit :

- « La même chose que vous, je suppose... »

Et sans se soucier de sa réaction, il tourna les talons et regagna sa précieuse place près de la fenêtre, mais pas trop loin de la cheminée non plus. Avec un peu de chance, le repas serait bientôt servi.

Tout de même un peu préoccupé par cette rencontre, Sayanel se demanda s'il avait déjà vu cette elfe auparavant. Il évitait de trop se faire remarquer en Asthaëlle. Si sa réputation sur Terre n'était déjà que trop bien connue, il espérait qu'ici son nom pourrait-être plus effacé.

Pourtant, elle devait bien avoir une raison pour le haïr à ce point, non ?

L’homme se redressa, mais il ne semblait pas vouloir la tuer ou quelque chose du genre... Elvawien se retint de sourire "Tant mieux, pensa-t-elle, je lui fais peur...". Le beau jeune homme répondit rapidement :

- « La même chose que vous, je suppose... »

Puis il se retourna, et partit s’asseoir à côté de la cheminée. "Piqueur de place". L’elfe sourit vraiment cette fois, et elle tira la langue... Elle ne remarquerait sûrement pas la présence dérangeante de cet homme, en s’asseyant près de la porte, loin de la cheminée. D’ailleurs, elle ne connaissait même pas son nom... Elvawien choisit alors de l’appeler : "Vavoirailleurssijysuis". Super nom ! Elle commençait à avoir faim... Comme en réponse, son ventre se mit à gargouiller. "Tais-toi !". L’aubergiste arriva rapidement, et l’elfe demanda une soupe bien chaude, ainsi qu’une chambre. La vieille femme passa aussi la commande de Vavoirailleurssijysuis, mais Elvawien ne fit pas l’effort d’écouter ce qu’il demandait... A quoi bon ? Alors que l’aubergiste revenait, l’elfe lui demanda une commission. Elle demanda à la vieille femme de porter le message suivant :

- « Ca, ça m’étonnerait... »

Intriguée, l’aubergiste avait accepté, et s’était rendue vers Vavoirailleurssijysuis, en lui faisant passer le fameux mot. Elvawien sirotait tranquillement sa soupe, en guettant la réaction de Vavoirailleursijysuis.

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Je n'aime pas parler à des fantômes. Qui êtes-vous ? Et pourquoi ce comportement avec moi ?

Vavoirailleurssijysuis sembla étudier le message, assez longtemps pour une simple lecture. Puis il se leva. Elvawien Del'Salim tourna la tête. Pourquoi se levait-il ? Il n'avait pas finit de manger ! L'elfe mit ses yeux dans sa soupe et mangea silencieusement. Elle l'entendit approcher... Mais qu'est-ce qu'il faisait bon sang ! Vavoirailleurssijysuis s'assit en face d'Elvawien. Elle releva la tête lui faisant comprendre qu'il n'avait rien à faire là, mas le jeune homme dit :

- « Je n'aime pas parler à des fantômes. Qui êtes-vous ? Et pourquoi ce comportement avec moi ? »

L'homme sembla frissonner et l'elfe s'en réjouit. Elle releva la tête et planta ses yeux noisettes dans les siens. Un regard valait mieux que mille mot, et elle essaya de bien lui faire comprendre de ne plus l'embêter. Elle se leva, et alla s'asseoir à un autre table, tournant le dos à Vavoirailleurssijysuis. Elvawien se rendit compte trop tard qu'elle avait oublié sa soupe... Tant pis pour sa fierté, elle avait faim.
Elle se leva, se dirigea vers la table du jeune homme, qui était la sienne quelques instants plus tôt, prit un air hautain, s'empara de sa soupe et repartit s'asseoir. Elle n'avait fournit aucune explication à Vavoirailleurssijysuis, et il semblait bien décidé à en avoir. Elvawien se retourna, et défia l'homme de revenir s'asseoir. De toute façon, à un moment ou à un autre, il faudra bien qu'Elvawien dise quelque chose à 'humain...
L'elfe médita... Pourquoi ne pas dire la vérité à Vavoirailleursisjysuis ? Comme ça, il arrêterait de l'énerver, et tout le monde serait content, enfin, surtout Elvawien. Elle décida, que si l'homme revenait, elle lui dirait peut-être la vérité, mais pas gentiment !